À l’heure actuelle, les chances que cette loi soit adoptée sont nulles, notamment parce que le projet de loi de Sánchez et Menendez – tous deux démocrates – ne prévoit pas un dollar pour renforcer la surveillance des frontières. Il y a 35 ans, les États-Unis, sous la présidence de Ronald Reagan, approuvaient leur dernière réforme de l'immigration, qui prévoyait une amnistie pour trois millions d'immigrés sans papiers qui pouvaient ainsi acquérir une nationalité. Depuis, le problème est au point mort dans ce pays. George W. Bush – républicain, comme Ronald Reagan – est le dernier président à tenter d'amnistier les immigrés sans papiers, qui seront 11 millions de personnes en une quinzaine d'années. Son successeur, Barack Obama, n’a jamais tenu sa promesse électorale de lancer des réformes.

C'est désormais au tour de Joe Biden. Les possibilités d’une réforme qui permettrait d’accéder à la citoyenneté ou, du moins, à la légalité, aux onze millions de sans-papiers qui vivent dans le pays – et dont le nombre n’a pas changé depuis 2008 – semblent lointaines. Mais là où il existe des possibilités de consensus, c'est sur des fronts plus petits, comme celui d'ouvrir la voie à la citoyenneté aux quelque 1.1 million de « rêveurs », c'est-à-dire des personnes qui sont des immigrants légaux mais qui sont arrivées aux États-Unis alors qu'elles étaient mineures, dans de nombreux cas lorsqu'elles étaient des enfants, avec leurs parents.
Légalement, ce sont des immigrants. Mais en pratique, ils ont passé toute leur vie aux États-Unis. D'autres groupes susceptibles de bénéficier du consensus politique sont les personnes bénéficiant du statut de réfugié temporaire (statut de protection temporaire ou, pour son acronyme en anglais, TPS) de dix pays (Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Haïti, Honduras, Nicaragua, El Salvador, Syrie, Népal et Yémen) et des travailleurs saisonniers venus effectuer des tâches agricoles.

Ces trois groupes – les « rêveurs », les TPS et les intérimaires – sont les principaux bénéficiaires du projet de loi présenté jeudi par la députée à la Chambre des représentants et qui sera présenté la semaine prochaine au Sénat par le sénateur Bob Menendez. En trois ans, les personnes appartenant à ces trois catégories pourraient obtenir la citoyenneté américaine. Cela représente moins de deux millions d'immigrés illégaux. Les neuf millions restants devraient attendre huit ans pour obtenir la citoyenneté, après avoir passé une série d'amendes et d'examens. À l’heure actuelle, les chances que cette loi soit adoptée sont nulles.

Entre autres choses, parce que le projet de loi de Sánchez et Menendez – tous deux démocrates – ne prévoit pas un dollar pour renforcer la surveillance des frontières. Le Parti républicain de 2021 n’a plus grand-chose à voir avec celui de 1986, et son opposition à l’immigration est l’une de ses caractéristiques. Et, pour les démocrates, les priorités sont désormais d’approuver le plan d’aide économique contre le Covid-19 et, cet été, le programme de relance qui relance l’économie américaine après la pandémie. Une fois de plus, les immigrés sont sur la route, même si le projet de loi ouvre la porte à une négociation d'où émergera peut-être une réforme partielle incluant les rêveurs, les TPS et les intérimaires.